Portrait de Jeanne Kefer (1885)

Huile sur toile, 80 x 80

A première vue, on pourrait croire que ce portrait n'appartient à aucun mouvement pictural particulier, on pourrait aussi penser avoir qu'il s'agit d'une photo. Mais ce n'est pas le cas: l'oeuvre est bien symboliste.

Observons l'enfant. elle porte un manteau, ce qui implique qu'elle va partir, pour une destination inconnue peut-être... On ne peut pas deviner ce qu'elle va faire: elle ne mime aucune action. C'est normal puisqu'elle pose. Mais alors, pourquoi ce manteau?

Ensuite, son visage est inexpressif, fermé, comme le monde dans lequel s'est enfermé Khnopff. Il n'exprime ni joie, ni peine. Jeanne semble dans un état second, une sorte d'état hypnotique.

De plus, la fillette est rousse: est-ce une coïncidence?

Elle est placée devant une porte, symbole de transition, de passage. Cette issue mystérieuse mène à on ne sait quoi.

Comme d'autres peintures de Khnopff, l'image n'a pas beaucoup de profondeur; on ne peut pas aller au-delà de la porte.

Les couleurs sont tendres, dans les gammes de gris et de bruns.

Voici quelques textes que nous voudrions mettre en rapport avec l'oeuvre

Maeterlinck, Âme de nuit (extrait, in Serres chaudes: )

Mon âme en est triste à la fin;

Elle est triste enfin d'être lasse,

Elle est lasse enfin d'être en vain,

Elle est triste et lasse à la fin

Et j'attends vos mains sur ma face.

J'attends vos doigts purs sur ma face,

Pareil à des anges de glace,

J'attends qu'ils m'apportent l'anneau;

J'attends leur fraîcheur sur ma face,

Comme un trésor au fond de l'eau.

Van Lerberghe, L'attente (extrait, in Entrevisions)

Je tremble et de joie et d'effroi.

Nue, en ma chevelure blonde,

J'attends que le soleil m'inonde,

Et qu'une ombre tombe de moi.

Maeterlinck, Chasses lasses (extrait in Serres chaudes)

Mon âme est malade aujourd'hui,

Mon âme est malade d'absences,

Mon âme a le mal des silences,

Et mes yeux l'éclairent d'ennui.

Xavier Noël et Natacha Stawarz